Il y a quelques semaines, nous étions conviés par le Syndicat de défense de l’Ail Violet de Cadours au lancement de la commercialisation de l’AOP Ail Violet de Cadours sur l’un des derniers grands marchés de vente d’ail de gré à gré. Le marché de l’ail de Cadours est un marché de gros historique (depuis 80 ans) ouvert aux producteurs vendeurs et aux principaux acheteurs qui sont avant tout des négociants. Ce marché fonctionne de la mi-juillet jusqu’à la fin de la période de commercialisation, soit jusqu’à la fin novembre voire début décembre. Retour sur un évènement important pour cette filière qui bénéficie d’un AOP depuis 2017.
Un AOP unique en France
L’Ail Violet de Cadours est l’unique ail français reconnu en AOP, comme nous l’explique Sébastien Taupiac, Président du Syndicat de défense de l’Ail Violet de Cadours : « Ce label, reconnu au niveau européen, désigne un produit dont toutes les étapes de fabrication sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même zone géographique, qui donne ses caractéristiques au produit. Toutes les opérations de la production de l’ail jusqu’à son conditionnement ont donc lieu dans le Pays de Cadours, contrôle à l’appui, qui agit à toutes les étapes de production, conditionnement et jusqu’à la première mise en marché. Même s’il a été récolté plus tard cette année du fait du printemps froid et pluvieux, les producteurs nous présentent ce matin un bel ail sec et violet conditionnés manuellement sous différentes formes : tresses (typiques pour l’ail de Cadours), gerbes, plateaux de 50 têtes, sacs de 5 kg… Dans tous ces conditionnements, chaque bulbe est identifié « Ail Violet de Cadours » par l’apposition d’une vignette autocollante. Nous allons donner le coup d’envoi à 10h00 précises. Les acheteurs pourront alors défiler dans les allées et observer les lots d’ail violet dans les coffres des camionnettes ou dans les remorques. Après quelques paroles échangées les affaires seront conclues. Avec pas moins de 200 producteurs d’ail de la région, le marché compte plusieurs allées dont une exclusivement réservée pour l’AOP Ail Violet de Cadours ».
Pourquoi l’ail est-il violet à Cadours ?
La couleur de l’ail violet, avec ses stries violacées « lie de vin », résulte de la combinaison d’un savoir-faire traditionnel, d’un climat local et d’un terroir propice au développement de sa saveur et de sa qualité, le Pays de Cadours. Il s’étend sur 3 départements : la Haute-Garonne (25 communes), le Gers (69 communes) et le Tarn-et-Garonne (12 communes). Il présente des facteurs naturels particulièrement favorables à la coloration : des sols argilo-calcaires ou calciques, un pic de pluviométrie en mai, et le fameux vent d’autan bien utile pour le séchage. L’Ail Violet de Cadours est le plus précoce des aulx français. Contrairement à beaucoup d’entre eux, il ne subit pas de traitement anti-germinatif. En effet, il arrive sur le marché dès le mois de juillet et se conserve sans problème jusqu’au mois de février s’il est maintenu à température ambiante dans la cuisine ».
Une filière qui se renouvelle
Avec pas moins de 90 producteurs et 6 négociants regroupés en Syndicat de l’Ail Violet de Cadours, la filière connait une belle évolution selon Stéphane Dargassies, Conseiller Agricole CD 31 : « Il y a de quoi être optimiste. La demande française est environ de 40 000 tonnes d’ail par an. Or la production nationale atteint seulement les 20 000 tonnes. A Cadours, la filière était vieillissante mais maintenant de jeunes producteurs arrivent et le renouvellement se fait. Il faut dire que depuis l’obtention de l’AOP il y a 2 ans, l’ail de Cadours a un prix rémunérateur et linéaire. La conséquence est un rajeunissement de la filière… ».
Un savoir-faire traditionnel et familial
Après avoir quitté le marché de l’ail de Cadours, nous nous sommes rendus dans l’exploitation de Gilles Cayrel, agriculteur exploitant depuis 1987 « Chez nous la production de l’ail violet est une tradition familiale qui se transmet de génération en génération. Une fois la récolte terminée en juin, les gousses sont accrochées sur des barres en bois de châtaigner dans le hangar ouvert sur plusieurs côtés. C’est notamment grâce au vent d’autan qu’elles vont sécher en un peu plus d’un mois. Vient alors une étape très délicate, celle du pelage (enlever la peau et les racines) et du triage des têtes d’ail. Elles doivent en effet répondre à des normes très précises pour bénéficier de l’AOP. Ici tout se fait à la main à l’aide d’un couteau. D’où la difficulté de trouver de la main d’œuvre. Il faut éviter de peler exagérément et d’éliminer trop de tuniques pour conserver la couleur. Ma mère Colette fait ce travail titanesque. C’est un vrai savoir-faire qui a malheureusement tendance à disparaitre. Un bon peleur peut peler jusqu’à 90 kilos par jour… S’en suivra enfin la confection des tresses, des gerbes et autres conditionnements toujours manuellement ».
Un ail très prisé par les chefs
Présent au marché de l’Ail Violet de Cadours, Bernard Bach, chef du restaurant Le Puits Saint Jacques à Pujaudran (labélisé Table de Prestige) en est un fervent défenseur : « C’est un plaisir de travailler avec un produit local qui de plus est, bon pour la santé ! J’utilise beaucoup l’ail de Cadours en cuisine car il donne de la force dans les jus et les garnitures ». A ses côtés, Olivier Verheecke, chef du restaurant l’Etang d’Ô à Villemur sur Tarn (labélisé Table de Terroir) acquiesce : « L’Ail Violet de Cadours fait partie intégrante de ma cuisine. Il se marie parfaitement avec de nombreux mets à l’image de d’agneau des Pyrénées ». (Voir recette : ci-après).
Annie Mitault